Skip to main content

Pour la petite histoire

bouton parchemin pdf bleu

Le jour de l'Entrée

10 septembre 2017

Les ratazazous sont de petits êtres hauts comme trois citrouilles à la peau grise et rugueuse, comme celle des éléphants. Ils ont des oreilles en forme de coquillages qu’ils appellent « coquillettes », et un nez en trompette qui joue vraiment de la trompette quand ils sont très contents, très en colère, ou simplement quand ils se mouchent. Il leur arrive de pleurer un peu, mais c’est seulement parce qu’au bord des yeux, il leur pousse de longs, très longs cils qui parfois s’emmêlent et leur chatouillent les paupières.

Mais aujourd’hui, pas question de laisser les cils s’emmêler. Aujourd’hui, c’est un jour important pour les jeunes ratazazous : c’est le jour de l’Entrée. Zazoum, Zoralarousse, Poumpoumpidoum et Cibiline se réjouissent comme des fous, ils font du bruit avec leur nez-en-trompette. Ils ont un peu le ventre noué, aussi. Surtout Zazoum, parce qu’il est très timide. Et puis Poumpoumpidoum aussi, qui est inquiet de ne pas être à la hauteur. Zoralarousse, elle, a peur de rater des explications, car elle a souvent la tête dans les étoiles.

Quand nos jeunes ratazazous arrivent sur la grand-place du quartier, les vieux ratazazous les accueillent. Ils leur expliquent l’importance de bien manger et de bien jouer ensemble pour réussir leur Entrée des métiers. Grâce à ça, ils pourront échanger un tas d’idées et apprendre un tas de choses. Ce sera très utile pour ce qu’ils auront à faire.

Tous les ratazazous, jeunes et vieux, se réunissent donc pour manger leur plat préféré : de la salade de petits dragons bleus. Il en existe de plusieurs sortes, au cacao, au potimarron, à la sauce tomate, et les petits dragons aiment nager dans l’assiette comme dans les estomacs ! Puis les ratazazous font une partie de ballon-trompillon, un petit ballon avec lequel ils se font des passes grâce à leur fameux nez-en-trompette. Enfin, quand ils se sentent suffisamment remplis de nourriture et de bonne humeur, les ratazazous expérimentés rejoignent les uns leur atelier, les autres leur bureau, et les plus sportifs vont sur le terrain. Les jeunes, eux, vont enfin pouvoir faire leur Entrée des métiers !

Le jour de l'Entrée

Car quand ils ne jouent pas et qu’ils ne mangent pas, les ratazazous travaillent à faire ce qu’ils aiment tous… Ils aident les habitants du monde à se comprendre, à se parler, à s’entendre : les ratazazous sont des spécialistes en communication. Pour cela, ils inventent toutes sortes de moyens et de petits objets formidables pour transmettre des messages, partager des informations. Certains s’occupent des messages écrits ; quelques-uns, des signaux ultrasoniques ; les plus rêveurs, des systèmes de télépensées. C’est que les habitants du monde sont compliqués, et ils ont bien souvent du mal à communiquer sans malentendus. Tant d’incompréhensions engendrent beaucoup de mauvaises paroles, des brouilles, parfois même des guerres… particulièrement en ces temps troublés. C’est pourquoi les ratazazous doivent sans cesse perfectionner leurs outils.

Face à tant de difficultés, les jeunes Poumpoumpidoum, Zoralarousse, Cibiline et Zazoum sentent soudain leurs cils trembler et ne disent plus un mot. Ils se demandent… Vont-ils réussir à aider les habitants du monde de leur quartier à communiquer ? Ils savent si peu de choses encore.

Mais la toute première chose à apprendre pour les jeunes ratazazous – et là, ils écoutent de toutes leurs coquillettes – c’est une chanson. C’est la chanson qui donne des forces, et qu’on chante pour se donner du cœur à l’ouvrage, même quand on a les cils qui s’emmêlent : cette chanson s’appelle la Radonelle. Car à la fin de leur première journée des métiers, nos ratazazous auront transmis plus de 1000 messages et mis en communication plusieurs centaines de personnes, rien que dans leur petit quartier. Il en faut, du cœur, pour faire tout ça !

Alors les jeunes ratazazous parlent entre eux, ils s’encouragent, se rassurent : « Nous travaillerons ensemble », propose Zoralarousse. « Oui, nous nous donnerons des coups de main », répond Cibiline. « Nous pourrions partager nos idées », essaie doucement Zazoum… Déjà leur peur diminue. Et si ça ne fonctionne pas du premier coup, ils n’auront qu’à recommencer à bien manger et à bien jouer ensemble, se disent-ils. Ils partent confiants, chacun dans son métier, en fredonnant la Radonelle. Ils sont fiers de se lancer dans leur nouvelle activité, c’est le début d’une sacrée aventure ! Ce soir, quand ils rentreront chez eux, ils auront déjà accompli de grandes choses, ils en sont sûrs.

Les habitants du monde, quant à eux, ignorent hélas tout des ratazazous. Car, à quelques exceptions près, les habitants du monde ne parviennent pas à voir ces charmants petits êtres. Et c’est bien dommage pour eux. Quelques exceptions ? Oui… ce sont les gens qu’on appelle parfois les « illuminés », les « dérangés » ou encore les « fous ». Ce sont ceux que l’on trouve un peu différents. En fait, ce sont ceux qui connaissent aussi la Radonelle.

 

Texte   Faustina Poletti
Illustration   Annick Vermot
Lecture, bruitages, mélodies   Faustina Poletti
Musique du générique   Thierry Epiney
Prise de son et mixage   Alexandre Défayes